Chevalier Avant Garde - Wet Under (PREMIERE)

C’est peu de dire que l’on avait été enchanté par Heterotopias (lire). Sorti en janvier 2012 via Skrot Up, ce premier LP du duo Chevalier Avant Garde dévoilait une mélancolie blême, synthétique, transpirant de synthétiseurs analogiques. Quand certains s’arc-boutent à dessein sur la froideur de mélodies réfrigérées, émanant de quelques notes de claviers, nos deux compères, baroudeurs d’eighties fantasmées, s’échinent à confectionner une musique sentimentale, à la fois maladroite et distraite, désuète et bancale, mais foutrement obsédante. Tels des souvenirs de gosse sommeillant dans les entrelacs de notre inconscient, et ne se rappelant à nous que par l’entremise de pensées insaisissables, les hymnes stellaires débités par Dimitri Giannoulakis et Filip Minuta flottent par-delà nos émotions sans même se laisser enfermer dans un carcan trop simple et réducteur, jouxtant une multitude de formations s’emparant d’une synth-pop passéiste et poussiéreuse. Avec leur nouvelle missive, l’élégant et texturé Resurrection Machine sorti le 10 septembre via Fixture Records, le duo canadien s’émancipe de ce vernis rétro-futuriste bien trop répandu – comme si l’avenir et sa formulation musicale s’étaient figés il y a trente ans -, esquissant une caresse auditive résolument intime, s’encanaillant de notre attention en pleine quête introspective. Resurrection Machine n’est pas une machine à remonter indéfiniment le temps, c’est une machine à peupler l’imaginaire et à le coloniser – comme en témoigne la pochette – d’un luminescent hologramme figurant un désert bleuté au crépuscule : on se laisse posséder tant par des tourbillons de voix désincarnés que par des fragments instrumentaux, opérant le liant d’un album tutoyant la maturité. Wet Under, malicieusement mis en image par Club Picasso, s’avère évocatrice : c’est dans les détails que s’affirme l’âge de raison.