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Nacho Picasso – Lord of the Fly

today28/01/2012 174 3

Arrière-plan
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Au premier abord, la dernière sensation street de Seattle, qui pourrait bien à lui tout seul faire passer Shabazz Palaces pour une bande d’amateurs, ressemble plus à un énième disque de black métal : une cover dans la droite lignée des illustrations héroic fantasy de Frank Frazzetta et un titre qui inspire satanisme et autres diableries… Pourtant, c’est bien dans la catégorie hip-hop que s’inscrit ce Lord of the Fly du très talentueux rappeur au pseudo de chaîne de fast-food expérimentalo-catalane, retrouvant à la production des obscurs beatmakers Blue Sky Black Death, seulement quelques mois après la livraison d’une première mixtape percutante, For the Glory.

A l’instar d’A$AP Rocky et autre Tyler, Nacho Picasso s’inscrit dans cette génération lose, mettant à nu ses propres névroses, ses galères de jeune adulte au sein d’une Amérique en proie à ses propres contradictions. Loin des clichés des faux bad boys (Gucci Mane ?) qui défoncent les charts US, Nacho dépeint avec subtilité et beaucoup de dérision une société se laissant couler comme le Titanic, se positionnant comme l’objecteur de conscience d’un ordre moral et philosophique délavé par des valeurs faussement puritaines. Mais Lord of the Fly est aussi bien moins que cela : derrière cette voix enrouée par le tabagisme dont le flow lent et vénéneux n’est pas sans rappeler MF Doom, le jeune rappeur chronique sous forme de journal intime le quotidien des jeunes branleurs du ghetto dont la conscience s’élève autant depuis les écrits opiacés d’un William Burroughs (Naked Lunch) que des aventures des super-héros de Marvel. Une démarche nerd assumée qui n’enlève rien à la tension des lyrics paranoïdes du MC un tantinet schizo, qui nous sert un rap codéïné aussi rugeux qu’hallucinogène. Une réussite appuyée par les instrus suffocantes du duo Blue Sky Black Death distillant sur l’ensemble un climat anxiogène. Sans donner dans la gaucherie et la grossièreté inutile, le duo de beatmakers installe une ambiance propice à accueillir le flow parfois malsain de Nacho Picasso tout en conservant des mélodies d’un minimalisme certes effrayant mais d’une beauté délicieusement hypnogène.

Dans un contexte où la jeune relève hip-hop préfère envahir le web afin d’imposer un style qui sied mal aux poids lourds de l’industrie du disque forçant néanmoins les projecteurs à se braquer vers elle, Nacho Picasso tire son épingle du jeu grâce à son style bâtard et versatile.  Un narcissisme extrême qui sur la longueur plombe légèrement ce Lord of the Fly mais qui se place malgré tout un cran au-dessus des productions blafardes qui trône sur les rayonnages des disquaires de rap US. L’album étant totalement gratuit, il est important de le souligner. D’ailleurs on vous file le lien ici.

Audio

Vidéo

Tracklist

Nacho Picasso – Lord of the Fly (BSBD Music, 2012)

1. Rammin’
2. Phantom Of The Opera
3. Lost Boys Feat. CENTURY
4. Naked Lunch
5. On A Bitch
6. Tool Man
7. Luca Brasi
8. Tutankhamun
9. Staring At the sun
11. Tree Tops
12. I’m a Greek God
13. Maintain

Écrit par: Akitrash

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Commentaires d’articles (3)

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  1. giyom sur 25/04/2012

    manifestement et c’est dommage vu que ce billet est plutot juste sur Nacho, vous n’avez rien compris a Gucci Mane. Et qualifier d’obscurs BSBD qui avec NOIR avait signé un LP très remarqué c’est un peu osé non ?

  2. akitrash sur 25/04/2012

    Même si je suis d’accord avec toi sur BSBD, le duo reste néanmoins très confidentiel ayant eu surtout son moment de gloire grâce à l’excellent à A heap of broken images sorti sur Mush ou le très ambivalent Late night cinema.
    Quand à Gucci Mane, nope pour moi ça reste du gangsta hip-hop bling-bling comme on en voit beaucoup ces temps-ci, alors que Nacho, s’inscrit un cran au dessus des Tyler et autre Asap qui font la une de l’Underground (enfin…), en véritable camé(cramé), se servant de certaines de ses références littéraires pour faire un pont entre son imaginaire, son savoir et son vécu… Au-delà de ses maladresses, on retrouve chez Nacho Picasso une naïveté nauséabonde et radicale pas ressenti depuis les bon vieux Ol’ Dierty Bastard… Soit quand les petits défauts finissent par définir la ligne de conduite artistique d’un rappeur. Totalement Paranoid! :)

  3. giyom sur 27/04/2012

    on est OK sur Nacho, bien vu la comparaison avec ODB. Quand a Gucci Mane je le vois pas comme un « rapper bling bling » comme peut l’être un lil wayne dans la mesure ou tout cet attirail d’or est une des formes d’expression de sa folie et pas seulement du show off comme beaucoup. Sur les K7 Trap back et Writings on the wall 2 ça sent plus la sueur les larmes et le bicarbonate que la joie de vivre… après chacun sa manière de recevoir les choses… :-)

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