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Histoire d’un soir : Les Veilles Charrues 2012

today05/09/2012 63

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Hasard du calendrier estival, on devait croiser dans le secteur au moment même où le mammouth breton allait fêter sa 21ème édition. On s’est donc dit qu’il serait idiot de ne pas aller y faire un petit tour. Côté programmation, dur pourtant de repérer une quelconque cohérence : véritable ogre à l’appétit aveugle, le festival invite, comme à l’ accoutumée, tacherons de supermarché et fines lames indie pop, pour un mezze musical qui peut vite paraître indigeste. 

En conséquence, après un examen rapide du programme, on choisira la journée du vendredi pour arpenter la prairie carhaisienne. On pourrait ainsi vérifier de visu si Bloc Party mérite encore d’exister, si les Other Lives allaient nous gratifier d’un nouveau moment de grâce, ou bien si les doigts boudinés de Robert Smith arrivaient encore à s’agiter sur une guitare. Cadeau bonus, l’excellent Baxter Dury était aussi présent au programme, en guise d’argument massue. Quatre concerts à voir dans la journée, ça semblait à la fois facile et suffisant. Mais le problème aux Vieilles Charrues, c’est d’une part la taille du site, d’autre part la profusion de bars sur votre chemin. De quoi foutre en l’air un plan de bataille pourtant limpide.

C’est donc l’esprit embrumé par la Coreff à l’heure du goûter qu’on se rendra compte qu’Other Lives a déjà joué, sans nous attendre. Heureusement, le souvenir de leur prestation quelques jours auparavant au Festival Beauregard est encore frais (lire), atténuant ainsi efficacement notre culpabilité. On en profitera donc pour prolonger un peu les réjouissances côté comptoir, soucieux de respecter la culture et la coutume locales. « C’est l’ esprit du Poher« , vous diraient les autochtones…

Mais il n’était pas question pour autant de louper notre second objectif, et on s’arracha donc à la gentillesse de nos hôtes et au confort de l’espace presse pour nous rendre au show de Bloc Party, tout là-bas, de l’autre côté de la prairie… Autant on avait  pas mal écouté Silent Alarm en 2005, autant on avait un peu oublié le groupe depuis, guère convaincus par les albums suivants. Qu’en sera-t-il du tout neuf Four ? Les Anglais défendront en tous cas leurs nouveaux titres avec une énergie – du désespoir ? – qui aimantera le public. Pourtant, ces chansons sombres, aux accents métal, n’engagent pas franchement à la fête, mais finiront par nous hypnotiser étrangement. Un concert convaincant, donc, qui se terminera dans une joyeuse tempête électrique avec l’imparable Banquet, la foule pouvant enfin évacuer à sa guise, soulagée, la tension accumulée durant le set urgent et nerveux du groupe.

Puis il fut déjà temps de s’extirper au plus vite de la masse pour aller voir notre cockney favori, qui entamait les hostilités sur une autre scène plus reculée, plus modeste. Le gros de la foule ne nous y suivra d’ailleurs pas, Cure investissant la plus grande scène au même instant pour débuter la grand-messe. On ne s’en plaindra pas, et c’est donc devant un public clairsemé – ce qui, aux Charrues, veut tout de même dire quelques centaines de personnes – que Baxter Dury enchaînera ses petits bijoux pop. Détendu, souriant, et donc à des années-lumières du personnage sombre et torturé de ses débuts, Dury livrera un concert parfaitement réjouissant, badinant entre deux titres avec le public ou ses musiciens. Il faut dire qu’il a de quoi être relax, le Baxter, tant il peut désormais piocher dans ses trois parfaits albums pour échafauder une setlist imparable, au sein de laquelle le récent Happy Soup (lire la chronique de l’album ici) se taillera tout de même la part du lion. Mais pour parachever notre bonheur, on aura le droit d’entendre également la magnifique Cocaine Man, toujours aussi somptueuse. Un sans faute, donc, comme on s’y attendait : sûr de ses forces, débarrassé de son encombrante ascendance, Baxter Dury semble désormais totalement épanoui et heureux, et nous avec.

Il ne nous restait plus alors qu’à jeter une oreille à Robert Smith et sa bande. Ça sera de loin, tant la marée humaine devant la scène nous coupera les jambes par avance. La suite des événements nous donnera raison : le groupe jouera ce soir-là durant trois heures, avec un final en forme de best of. Une setlist aussi adipeuse que Smith, et qui aurait sérieusement gagné à être allégée. Non mais franchement, aussi important ce groupe fut-il, qui peut se fader aujourd’hui trois heures de live de Cure sans s’ennuyer ? Peut-être, pour une raison qui m’échappe, le public des Vieilles Charrues, justement. Le même qui portera aux nues quelques minutes plus tard le vomitif Martin Solveig.

Mais peu importe, finalement, que Cure ou d’autres aient monopolisé ce soir-là le temps et l’espace : on aura pour notre part réussi à se ménager une jolie oasis musicale, et fait de bien sympathiques rencontres. Par sa programmation aussi discutable que pléthorique, le festival suscitera a priori encore longtemps au moins autant de critiques acerbes que de réactions enjouées. Mais pour qui fait l’effort de trier le bon grain de l’ivraie dans cet énorme barnum musical, l’expérience, tant par le gigantisme de la manifestation que par son absence – assumée ? – de ligne directrice, tant par son public bigar(d)ré que par sa forte identité, se révèle unique en son genre.

Écrit par: S.L.H.

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