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2014, le rap US en trente incontournables

today30/12/2014 1421

Arrière-plan
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migosEn 2014, le rap US a poursuivi sa grande mutation entamée il y a quelques années pour devenir ce marché déjà complètement plongé dans son futur. S’éloignant de plus en plus des canons des « albums » traditionnels, aligné sur les modes de consommation de ses auditeurs, le voilà qui s’engouffre dans un monde semi-ouvert où règnent en maîtres singles et autres mixtapes lâchés par kilos, où la survie va dépendre de sa propre capacité à suivre la cadence. Car de la matière, il y en a : un compte Audiomack et Soundcloud, un tour quotidien sur Datpiff et Livemixtapes, vous voilà noyés chaque semaine sous des dizaines de sorties en tous genres. Autant dire qu’opérer un tri savant entre bombe inattendue et énième morceau radio-calibré sans surprise devient un véritable sport de combat. Pour vous, j’ai sélectionné les 30 morceaux qui ont dépassé tous les autres de la tête et des épaules, classés selon aucun ordre particulier. Beaucoup d’Atlanta, la Mecque, l’avant-garde, mais aussi des nouveaux venus, des vieux renards, des stars ou des comètes. Au global, pas mal d’allumés, surtout. Le rap outre-Atlantique a rarement été aussi exaltant qu’aujourd’hui, la mixtape à télécharger ci-après d’une dizaine de morceaux et ce top 30 en sont l’illustration.

Mixtape

01. Lil Boosie – I’m Coming Home
02. OG Maco – Seizure
03. Rich Gang – Flava
04. Shy Glizzy – Handcuffs
05. Rome Fortune – Why
06. Starlito – My Story, History
07. King Louie – Live & Die In Chicago
08. Future – Covered N Money
09. Kevin Gates – Perfect Imperfections
10. Lil B – Be Brave Welcome Home

Top 30

1. OG Maco feat. JerZ – Seizure (Prod : Lex Luger)

C’est peu de dire que le nom d’OG Maco était sur toutes les lèvres en 2014. Porté par un Quality Control qui s’impose aujourd’hui comme la véritable relève d’ATL, Maco se voit propulsé par la hype sur Vine entourant U Guessed It et sa prod ultra minimaliste sur fond d’explosion canalisée. Sur Seizure, l’ambiance est à un rap maximaliste du fond de la cave mais qui retrouve cette envie de mordre tout ce qui bouge, propre au flow singulier de son géniteur, à la limite de la crise d’asthme. Une véritable claque sur une production dangereuse signée par l’incontournable Lex Luger.

2. Future – Blood, Sweat, Tears (Prod : Boi-1da)

Honest aura été attendu, trop attendu. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, il aura aussi été mal écouté, trop mal écouté. Mésestimé en cette fin d’année, il reste pourtant l’un des albums les plus solides du rap US de 2014. Future a grandi depuis Pluto, le voilà face à un tournant décisif pour sa carrière. Une performance commerciale décevante plus tard, Honest est pourtant une confirmation esthétique : plus mature, plus accrocheur et cohérent, il est porté par quelques véritables morceaux de bravoure pop-rap uniques, dont ce Blood, Sweat, Tears plus cheesy, percutant et touchant que n’importe quel refrain passé du rappeur d’ATL. Sur une production ambitieuse et un poil cliché de Boi-1da, Future se prouve à lui-même et aux autres que rien n’a remplacé le travail acharné pour passer du rôle de space cadet à celui de star en devenir. Mais le chemin est encore long.

3. Migos – Take Her (Prod : Phenom Da Don & Dee Money)

L’autre sensation de 2014, c’est l’inarrêtable ascension du trio Migos. Porte-étendards du rap à onomatopées qui fait mouche, surfant sur le tsunami Versace de l’année passée, Offset, Quavo et Takeoff ont pris leur envol en 2014 : 4 tapes dont la récente Rich Nigga Timeline, quintessence du rap sudiste porté par une palanquée de producteurs au sommet de leur art (le Zaytoven nouvelle saveur, TM88, Swift, Cheeze Beats…), beats dépouillés, presque décharnés, mais vivants au possible. Sur Take Her, paradoxalement le morceau le plus réussi de la tape, Migos délaisse les cris primaires, s’autotune légèrement et nous emporte sur la prod groovy de Dee Money & Phenom Da Don pour une session rapprochement des corps plus que convaincante.

4. King Louie – Live & Die In Chicago (Prod : Smylez)

Dans la catégorie « arlésiennes du rap », le premier véritable LP de King Louie commence à rejoindre le haut du classement. A peu de choses près, sa mixtape Tony aurait pu être cet album tant attendu. On y retrouve tous les ingrédients qui ont fait du rappeur de Chicago l’une des véritables valeurs sûres du rap ces dernières années : ambiance pesante, voix profonde et hommage à sa ville, Louie a fait de ce Live & Die In Chicago un véritable hymne à l’une des métropoles les plus dangereuses du pays, tour à tour admirée et crainte. Si sa trajectoire est aujourd’hui au moins autant étrange que captivante (un feat sur Yeezus mais pas encore de véritable existence en major), loin de la hype drill d’il y a deux ans, King Louie est resté là, les dreads solides, pour se faire une place privilégiée dans le paysage US.

5. Lil Boosie – I’m Coming Home (Prod : Lil Boosie)

En 2010, on pensait Lil Boosie condamné pour le rap : accusé du meurtre de Terry Boyd, le voilà pourtant qui sort Incarcerated, son quatrième solo et son meilleur disque à ce jour. Mais en près de quinze ans de carrière, le rappeur de Baton Rouge a déjà démontré à maintes reprises sa capacité à revenir de loin pour marquer les esprits. Innocenté puis libéré au printemps dernier, le voilà de retour avec Life After Deathrow, sorti fin octobre. Boosie et son flow nasillard plus tranchants que jamais nous rappellent que rien n’est jamais terminé. Sur I’m Coming Home, Boosie règle ses comptes et embraye sur 2015, regonflé comme jamais.

6. Cozz – Dreams (Prod : Meez)

Signé sur Dreamville, label de J. Cole, Cozz n’était pas à proprement parler l’un des noms les plus attendus de l’année écoulée. Mais son premier solo, Cozz & Effect, aura suffi à convaincre les plus réticents. A tout juste 21 ans, le rappeur originaire de South Central, L.A., déploie une formule simple, sans fioriture : des prod dures, un flow agressif et une hargne trop rare pour un rap aussi simple et direct qu’efficace. A l’image de ce Dreams qui ouvre l’album, sur ces notes de piano langoureuses et inquiétantes.

7. Rome Fortune – Why (Prod : Pat Lukens)

Sorti de la cuisse du DIY ATLantiste après des années de tapes balancées plus ou moins anonymement, Rome Fortune voit en 2014 sa hype atteindre le niveau max. Début 2013, Beautiful Pimp avait mis du temps à sortir du lot mais présentait déjà un Rome Fortune concentré sur une autre forme de son du Sud, différent de ses comparses à succès mais partageant des potes avec eux (Childish Gambino en premier lieu). Small VVorld repousse encore les limites d’un Rome Fortune plus que jamais à la limite de l’arty, mais qui le fait bien : du claustrophobique 4 Seasons au surf sous la pleine lune sur un Why captivant, mis en musique par Pat Lukens, tout est déjà bien maîtrisé et mature. Comme le dit Fortune lui-même : « I chose the composition of this project the way I did because the degrees of separation between each of the individuals I worked with was so small but the elements that they all brought sonically varied in such a huge way ».Le rappeur que tes potes blanchots ont écouté toute l’année, sans trop se gourer cette fois. Atlanta l’éternelle.

8. Ghostface Killah, Elzhi & BadBadNotGood – Gunshowers (Prod : BBNG)

Pour Ghostface et la clique du Wu, 2014 s’est avéré aussi compliqué à gérer que 2013 : un album collectif que l’on aimerait oublier, une série d’apparitions gênantes sur les plateaux télé aux US, un 36 Seasons tellement classique et sans surprises qu’on le croirait sorti de l’académie du rap 90’s… Heureusement qu’il y a eu ça, Gunshowers, en collaboration avec les jeunes jazzmen de BBNG et le rappeur de Slum Village Elzhi. Soit l’un des meilleurs moments estampillés GFK entendus depuis un long moment : de la hargne, de la subtilité dans la composition sur cette petite guitare glissante et beaucoup d’efficacité. Pas d’innovation mais le perfectionnisme d’une formule que l’on sait plus que jamais efficace. On attend Sour Soul de pied ferme.

9. Migos feat. Young Thug, Rich Homie Quan & Jermaine Dupri – New Atlanta (Prod : Murda)

Atlanta est partout, me direz-vous. Je n’y suis pour rien si la métropole géorgienne reste aujourd’hui encore l’épicentre de tout ce qui se fait de plus excitant et prometteur au sein du rap US. Surtout quand les stars du coin, Migos, Young Thug, Rich Homie Quan et Jeremiah se mettent ensemble pour sortir l’hymne définitif à la nouvelle génération d’ATL, hommage assumé à un morceau de Jermaine Dupri sorti début 2000’s. Les années passent mais les valeurs sûres demeurent. On n’a jamais été aussi content d’écouter ce rap-là en 2014.

10. Rich Homie Quan, Young Thug & Birdman – Flava (Prod : Dun Deal & London On Da Track)

Sur leur projet commun, Rich Homie Quan, Young Thug et Birdman ont prouvé à tous à quel point le concept de supergroupe pouvait encore avoir du sens. Publiée à l’origine pour soutenir une série de concerts dans le courant de l’année écoulée, leur mixtape Rich Gang – Tha Tour Part 1 s’est tout de même payé le luxe de finir 2014 dans tous les tops existants, bien au-delà du petit univers rap. C’est peu de dire que le trio aura réussi son coup en combinant trois artistes aux capacités et talents tout à fait complémentaires. La preuve une nouvelle fois sur Flava et Tell ‘Em, deux grands moments de la tape que l’on doit à l’évident talent de London On Da Track, l’un des énièmes talentueux producteurs du coin. Entre refrain hommage à Flavor Flav, flows tout-terrain sur sol en marbre et délicatesses rnb pleines de stupre, le trio prouve s’il était nécessaire qu’en 2014, Atlanta a dominé les débats de la tête et des épaules.


11. Lil Herb – 4 minutes Of Hell Part. 3 (Prod : Luca Vialli)

Changement d’ambiance : Chicago, 2014. Après son featuring avec Nicki Minaj sur le bien nommé Chiraq et un feat. sur le Nobody’s Smilling de Common, Lil Herb se voit propulsé sur le devant de la scène rap nationale. Au début d’année, il avait déjà frappé fort avec sa première mixtape solo Welcome To Fazoland que tous les fans de rap ultra-durs ont écoulé en boucle cette année. Une souffrance palpable sur 4 Minutes Of Hell Part. 3 qui se répand sur le reste de la tape : la voix rauque et l’agressivité manifeste de Herb, les voix mystiques de la prod de Luca Vialli, tout concorde pour créer une ambiance aussi oppressante que possible. Chicago cuvée 2014 en 4 minutes 40.

12 G-Side – Dead Fresh (Prod : The Block Beattaz & Stack Trace)

Des Gs de l’espace au volant de leur bagnole, hustle stellaire et rap cosmique aux accents 90’s, le duo originaire de Huntsville, Alabama, a fait les choses bien pour son retour aux affaires après dix-huit mois de hiatus. Sur Dead Fresh, épaulés par le trop rare Kristmas, Huntsville aussi, et Grilly, le duo pose les bases de sa formule en décalage complet avec l’époque. Revenus d’une errance dans les étoiles, ils en ont ramené de la poussière de groove d’une autre galaxie. Tant pis pour les charts, tant mieux pour nous : Gs II Godz est un voyage ailleurs, sur fond de synthé vintage, à la découverte d’un rap entre les dimensions, aussi singulier que percutant.

13 Rick Ross feat. Kanye West & Big Sean – Sanctified (Prod : Kanye West, Mike Dean & DJ Mustard)

Après une promo en grande pompe, la transformation de Rick Ross en Barry White remixé sur Mastermind n’aura pas tout à fait convaincu. Mais Rozay n’a jamais vraiment su faire d’albums réussis de bout en bout, rien ne change. Il est par contre capable de fulgurances, à l’image de ce Sanctified sur une très prod très « Kanye à l’ancienne » mais diablement efficace. Le lien entre la soul la plus torturée et le rap de brigand de 2014 a rarement été aussi bien fait récemment. Kanye et Big Sean complètent le tableau. Le sample de Betty Wright, choix du roi, file des frissons et place les compères sur une rampe de lancement à destination d’un paradis rempli de blé et de nanas pas trop farouches.

14. Future – Covered N Money (Prod : Sonny Digital)

Enième single d’un album qui n’aura jamais vraiment trouvé son rythme, Covered N Money est l’une des belles réussites de Honest : une prod dangereuse signée Sonny Digital dévoile un Future intouchable, à bout de souffle mais en pleine maîtrise. Un déséquilibre permanent qui dévoile combien l’ATLien est seul dans son univers parfois mal compris et mal écouté. Les sourds s’en mordront les doigts, Future est loin.

15. Starlito feat. Too Tone & Petty – My Story, History (Prod : Trakksounds & Albie Dickson)

Mental Warfare en 2012, Cold Turkey / Fried Turkey en 2013, Black Sheep Don’t Grin en 2014, une volée de tapes entre tout ça : Lito poursuit son ascension vers les sommets d’un rap géré presque tout seul mais qui commence à former de jolies grosses vagues bien régulières. Le trentenaire de Nashville trace sa route sur ses morceaux où il marmonne presque, la voix traînante et accrochée sur tous les beats. Sans véritables moments de bravoure, Black Sheep… s’écoute d’une traite ; nouvelle livraison solide et cohérente où le rappeur s’enfonce à dessein dans le côté obscur de sa musique, plus downtempo et grave que jamais, très ambient dans l’esprit, par endroits. Lito ne triche pas, renoi sensible.

16. Kevin Gates – Perfect Imperfections (Prod : Red On Da Track & Touchdown)

Si Lito est l’ombre, Kevin Gates est la lumière. Bien brillante et bien dingue. La comète Gates se rapproche de la Terre et commence à en changer très subtilement l’axe de rotation. Sur le même trend que son pote de Nashville, le rappeur de Baton Rouge débarque le même jour, le 15 décembre, avec un Luca Brasi 2 plus dense que jamais. Un second volet qui éclipse même la première mouture qui aura bien squatté nos platines début 2013. Blindé de bombes en puissance, à l’image de ce Perfect Imperfections qui résume à merveille tout le talent de Gates : il passe du réel à l’irréel, du chant vocodé au rap le plus dur, avec une aisance folle. La densité des productions et l’inventivité du rappeur font de ce Luca Brasi 2 l’un des grands moments de 2014. On n’en attendait pas moins.

17. Tree feat. Lennon Of Project Mayhem – Grace (Prod : Tree)

Baptisée « soul trap » par son géniteur, la musique de Tree n’a pas vraiment d’équivalent aujourd’hui. Puisant à la fois dans l’héritage soul de sa ville natale, Chicago, et dans les influences trap incontournables depuis la fin des années 2000, Tree est un mystère mais se fait petit à petit sa place dans le panorama des figures singulières d’un rap en renouvellement permanent. Après la très réussie Sunday School II, Tree balance début 2014 un nouvel EP gratuit bien fumé comme on l’aime : la voix rauque et dure de Tree qui se balade sur des samples soul pitchés à fond ou des prods parfois à la limite du rap expé early 2000’s, Grace rassemble tout ça et plus encore, dans une tentative de trait d’union en forme de Frankenstein étrange par moments. En 2014, personne n’a sonné comme Tree, c’est une certitude.

18. Gucci Mane – Swole Pocket Shawty (Prod : Da Honorable C.N.O.T.E.)

La vie de Gucci Mane semble être la même que la nôtre : les choses, à la fois changent et ne changent pas. Sauf que pour Guwop, sa vie c’est de nouveau la prison jusqu’à fin 2016 pour port d’arme illégal et qu’il sort tout de même 15 mixtapes par an, au bas mot. Sur Trap God 3, Gucci Mane s’en va explorer d’autres recoins de sa personnalité que les milliers de morceaux déjà sortis depuis ses débuts n’ont jamais vraiment effleuré. Plus mature et sérieux que par le passé, le voilà qui se met à crooner comme jamais sur une prod de belle facture trap estampillée C .N.O.T.E. Depuis une poignée d’année, Gucci Mane est au sommet de son étrange carrière, fidèle à ce qu’il a toujours été : intouchable, à la fois en avance et en retard sur son temps, mais toujours dans sa cuisine perso.

19. Shy Glizzy – Handcuffs (Prod : KE On The Track)

Depuis l’avènement de Wale au tournant des années 2010, le rap de Washington D.C. a enfin rejoint la carte des scènes locales à l’échelon nationale, bien boosté par le talent et les budgets du MMG de Rick Ross. Dans son sillage, Fat Trel et surtout le jeune Shy Glizzy se voient aujourd’hui propulsées porte-paroles d’un rap qui sort peu à peu de son enclave. Fort d’une série de tapes de bonne qualité, Shy Glizzy, tout juste 22 piges, revient à l’automne dernier avec Law 3 pour clore une année 2014 en forme d’envol pour lui. Sur Handcuffs, il s’allie avec le trop peu cité KE On The Track pour un morceau pop-rap addictif agité par le semi-flow semi-chant d’un Glizzy sur une corde raide. Porté par le succès de son single Awwsome, 2015 semble s’annoncer comme une année décisive pour lui.

20. Ty Dolla Sign & BJ The Chicago Kid feat. Juicy J & Rich Homie Quan – Dead Presidents (Prod : Metro Boomin)

De la clique angelino Pusha$ Ink, on a beaucoup entendu parler de YG cette année, surtout en-dehors des cercles rap traditionnels. Mais Ty Dolla Sign n’a pas chômé, de son côté. Après avoir gravi les charts avec les singlesParanoid et Or Nah fin 2013 et début 2014, le rappeur/chanteur/producteur embraye fin août avec la sortie de Sign Language. Une nouvelle livraison cohérente et solide où Ty explore le volet le plus r’n’bisant et sombre de sa musique, bien assisté par un Metro Boomin tout à ce qu’il fait. La preuve sur l’excellent Dead Presidents où Ty convoque Juicy J et Rich Homie Quan, décidément partout, pour l’un des grands moments de la tape. Alors que l’on attend plus que jamais son premier véritable album Free TC, repoussé une nouvelle fois, Ty Dolla Sign semble plus que jamais en bonne voie de rejoindre ses potes YG et DJ Mustard dans le petit cercle des nouvelles têtes qui comptent à L.A.

21. Drake – 6 God (Prod : Boy-1da & Sky Sense)

Drake est partout : dans tes remixes, tes freestyles, sur la tournée Tha Carter V, sur tes plateaux télé, dans tes Tumblr ou dans ton slip. Mais Drake prend son temps pour bosser ses disques et ne multiplie pas les sorties sans raison. 2014, année de transition, où le Canadien a prêté son nom a beaucoup d’artistes, sans vraiment prendre la peine de porter lui-même un nouveau projet. Si ce n’est la pléthore de morceaux gratuits leakés ici et là, à l’image de l’excellent 6 God, sorti pour son anniversaire après avoir vu le morceau déjà leaké par des hackers quelques temps auparavant. Trois minutes dans l’urgence de ces pseudo-cuivres sur lesquels Drake s’amuse à annoncer ce qui ne peut qu’arriver : écraser la concurrence, avec le sourire.

22. Vince Staples – Blue Suede (Prod : Hagler)

Presque qu’inconnu pour beaucoup hier, l’arrivée chez Def Jam du jeune Vince Staples lui aura permis de franchir plusieurs étapes d’un coup. Son Hell Can Wait dans tous les esprits en cette fin d’année, le voilà parmi la petite liste des rappeurs qui vont sûrement marquer 2015. Un disque porté notamment par l’addictif Blue Suede signé Hagler, le pote de Drake. Un synthé tordu et angoissant, une ambiance froide et glaciale typique des G’s les plus durs de la Côte Ouest, entre hommage aux Crips et basses surgonflées. Staples les aime ses putains de Jordan bleues.

23. Young Scooter – What Happened To Me (Prod : Metro Boomin)

Elu mec le plus étrange d’Atlanta, Young Scooter semble dériver un peu à côté de ses potes du Freebandz. Sans faire de vagues, son style chanté bizarre fait école et le voilà qui s’invite à la table des gentils freaks du rap sudiste. Sorti le premier jour de 2014, le très attendu Street Lottery 2 n’aura pas fait mentir les fans. Bien qu’un peu bâclée techniquement (la qualité de certains morceaux…), la tape propose un Young Scooter pur jus, trap comme jamais sur un What Happened To Me de haute volée. En dilettante, son chant semi-rappé marque la rue, sans aucun doute. Street Lottery 3 est imminent ; Jugghou$e, on espère, pas disparu dans les limbes.

24. ASAP Ferg – Fergsomnia (Prod : Very Rare & DRAM)

Où est passée l’ASAP Mob ? Disparue des radars, après nous avoir promis de grands bouleversements. Pas totalement crédules, le funeste destin musical d’ASAP Rocky, devenu l’ombre de lui-même, nous avait laissé entrevoir un avenir plutôt sombre pour le crew new-yorkais. Mais ASAP Ferg semble avoir réussi à sortir de la masse pour se faire un nom à lui seul. Après un Trap Lord salué en 2013, Ferg revenait fin novembre avec sa nouvelle tape Ferg Forever. Plus sombre et plus secoué que son comparse Rocky, Ferg dévoile sur Fergsomnia quelque chose de plus inquiétant et captivant encore. Un flow d’insomniaque sur un beat de parano total signé Very Rare & DRAM.

25. YG feat. Jeezy & Rich Homie Quan – My Nigga (Prod : DJ Mustard & Adam)

En 2014, il y a eu YG et les autres. Sa relecture moderne de l’héritage G-funk de Compton a marqué les esprits, plus fortement encore que ce qu’on aurait pu attendre. Et ce même si My Krazy Life avait été porté en septembre 2013 par un single, un vrai tube presque hyphy, My Nigga, signé DJ Mustard et Adam. La fusée rap, l’hommage aux potos, des guns, la folie, tout y est. S’il ne vient rien révolutionner, YG propose l’un des albums les plus solides et cohérents de 2014, bien installé en haut des charts et des tops. Mais il faudra aller plus loin pour marquer le rap en profondeur, désormais.

26. Lil B – Be Brave Welcome Home (Prod : Lil B)

Qui n’a jamais été convaincu par Lil B n’a jamais suffisamment écouté Lil B. Depuis que son nom est devenu synonyme de religion païenne, Lil B semble s’être détaché des contingences rap habituelles pour faire son truc et planer si haut que personne ne pourra plus jamais le ramener sur la terre ferme. Le voilà déjà aux portes de son Basedworld Paradise, en train de prier le Based God de toutes ses forces. Sur la tape sortie en 2014, Lil B dévoile l’un des projets les plus consistants de sa longue discographie fourre-tout. Mélange d’inspirations soul, de cordes majestueuses et de grandes leçons de vies freestylées comme à son habitude, Lil B n’a jamais été aussi serein et sûr de lui que par le passé, jusqu’à déclamer son amour pour tous, ami ou ennemi, en pleine recherche d’une sagesse infinie et d’une paix intérieure. Son cœur nous est ouvert, rejoignons-le.

27. Chief Keef – Faneto (Prod : Chief Keef)

2014 s’est révélée être une année bizarre pour Chief Keef. Après avoir été adoubé par l’ensemble des médias et de l’industrie musicale comme la nouvelle perle d’un rap US sombre et violent en 2012, Keef est resté celui qu’il a toujours été : un mec du quotidien, hors des codes d’un business musical qui attendait de lui une conduite particulière. Annoncée en juin chez Interscope, sa tape Bang 3 est repoussée une première fois en octobre puis de nouveau début décembre. Une embrouille avec la maison de disques plus tard, cette dernière débarque un Keef qui n’en a rien à foutre : le voilà derrière le micro et, pour la première fois, aux manettes sur les trois-quarts de Back From The Dead Vol, 2, sa nouvelle mixtape. Dans son style caractéristique, complètement offbeat et totalement instinctif, Keef flotte au milieu des prods, virevolte sans jamais se poser là où on l’attendrait. Une patte musicale si étrange qu’on la penserait complètement flinguée s’il ne s’agissait du style inimitable de l’un des rappeurs les plus marquants des dix dernières années. Le temps de Finally Rich semble révolu : Keef se met à exposer en galerie d’art et a décidé de faire le rap le plus barré qui soit, grand bien lui fasse.

28. Nicki Minaj – Want Some More (Prod : Zaytoven, Metro Boomin, Hitmaka et Nicki Minaj)

Oui, une seule femme dans cette sélection. A l’heure où l’on féminise beaucoup les choses pour le rétablissement d’un équilibre salutaire dans la société, c’est presque une provocation sans le vouloir (*insérez ici un débat que je n’ai pas envie d’avoir*). Mais lorsque la femme en question vaut presque tous ses collègues masculins réunis, l’égalitarisme, on se le fout au cul. Nicki Minaj n’est pas une femme, c’est un phénomène : les fringues, le style et la classe, à la fois creepy et percutante, flow caméléon, grosses couilles assumées et troublante de sincérité. La meilleure rappeuse de l’histoire (désolé Roxane, Missy) revenait en 2014 avec un album de plus d’une heure plus rap que jamais. Surfant sur le succès du très « Sir-Mix-A-Lot » Anaconda, The Pinkprint vient clore une année dense pour Nicki, dans les charts, à la télé, dans les magazines people, partout. Want Some More, bien sûr, toujours, quand tu veux, Nicki.

29. E-40 feat. Lil Boosie – Money Sack (Prod : Mike Free & BAM)

E-40 sera toujours E-40 : le daron du rap de la Bay Area est plus vivant que jamais, vingt ans après ses début. Suite à la série The Block Brochure entamée en 2012, E-40 lâche début décembre le pavé Sharp On All 4 Corners, un double album + deluxe edition bien dense qui renvoie les gamins de la Bay à leurs fondamentaux. Sur Money Sack, accompagné de Lil Boosie, E-40 montre à quel point il sait plus que jamais surfer avec talent sur un beat minimaliste et groovy à souhait, signé Mike Free et BAM. La recherche du billet vert, une quête interminable.

30. IamSu ! – I Love My Squad (Prod : Iamsu! Of The Invasion)

Du côté de la Bay, tout le monde le sait désormais : le présent et l’avenir appartiennent au Heart Break Gang. Paradoxalement, l’année fut compliquée pour IamSu !, tête de proue du crew originaire de Richmond. Son LP Sincerely Yours, pêchant par trop de compromis entre différents styles, s’est surtout vu dépasser par celui de son comparse Sage The Gemini. La série Kilt ou sa tape avec Problem en attestent pourtant : IamSu ! est capable de très belles réussites, à l’image de ce I Love My Squad et son refrain tout en réverb, calqué sur les codes de la hyphy qu’il maîtrise comme personne, sur fond d’ambiance occulte inquiétante.

https://www.youtube.com/watch?v=yGl0rS-ZcV4

Écrit par: Dom Tr

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